jeudi 12 avril 2012

L'éducation n'est plus nationale

Nouvelle opération des parents d’élèves et des enseignants en colère aujourd’hui (Le Progrès, le 11/04/2012)

Parents d’élèves et enseignants du Jura ne décolèrent pas. Et ne désarment pas.

Aujourd’hui, mercredi, leur collectif, baptisé « Des vigies pour l’école du Jura », associé pour l’occasion à celui du Doubs, a prévu de remettre symboliquement un chèque de 22 000 euros au recteur d’académie à Besançon « pour l’ensemble de son œuvre de destruction massive ».
Le montant correspond à la prime que le haut fonctionnaire de l’Éducation nationale est supposé toucher pour avoir respecté ses objectifs, en l’occurrence programmer la fermeture de 31 classes et 5 écoles dans le Jura et la suppression de 35 classes et 4 écoles dans le Doubs.
Le rendez-vous est fixé à 14 heures, cet après-midi (11 avril), place de la Libération.

Le collectif avait par ailleurs demandé à être reçu par François Hollande, en meeting hier à Besançon. Le candidat du Parti socialiste à l’élection présidentielle n’a pas répondu.

*** Ajouts le 12 avril 2012 ***

22 000 euros au recteur : « coût » de colère des parents d’élèves et des enseignants (12/04/2012, Le Progrès)


Besançon. Enseignants et de parents d’élèves du Jura et du Doubs sont allés hier remettre un chèque au recteur dont le montant correspondrait aux indemnités censées percevoir le fonctionnaire pour avoir respecté ses objectifs.

Parents d’élèves et enseignants étaient une cinquantaine à manifester hier à Besançon, pour dénoncer la fermeture programmée à la rentrée prochaine de 31 classes et 5 écoles dans le Jura et la suppression de 35 classes et 4 écoles dans le Doubs. Comme ils l’avaient annoncé, les collectifs des deux départements se sont réunis place de la Révolution, avant de se rendre au Rectorat [...]

L’autre point de contestation portait sur la préparation de la rentrée 2012 et le non-remplacement des fonctionnaires partant à la retraite [...]

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Ecole : les moyens attribués renforcent les inégalités
(12.04.2012, par Maryline Baumard, lemonde.fr)

[...] L'éducation n'est plus nationale. Un rapport d'observations provisoires de la Cour des comptes que Le Monde s'est procuré montre pour la première fois l'injustice de la répartition des moyens d'enseignement sur le territoire. Quelque 93 pages d'un travail inédit dévoilent ligne après ligne comment l'Etat donne plus à ceux qui ont déjà plus et moins à ceux qui cumulent tous les risques de réussir moins bien. Un favoritisme qui s'est aggravé ces dernières années.

[...] Selon la chronologie évoquée dans ces pages, il a fallu une année aux rapporteurs de la Cour des comptes pour obtenir les données nécessaires à leur travail. Les magistrats racontent avoir dû batailler ferme pour obtenir certaines informations du ministère de l'éducation, et précisent que leurs demandes "n'ont pas toujours abouti".

Même si la situation est ancienne, le gouvernement n'a aucun intérêt à laisser sortir ces comparaisons, qui montrent qu'en 2010 l'Etat a dépensé 47 % de plus pour former un élève parisien que pour former un banlieusard de Créteil ou de Versailles. 51 % de plus pour former un Parisien qu'un Niçois... Il est décrit, noir sur blanc, comment sous couvert d'une éducation censée offrir à tous la même chose, voire donner plus à ceux qui ont moins, l'école française entérine des situations acquises qui sont profondément injustes.

[...] Le ministère octroie les postes d'enseignants aux académies ni vraiment en fonction du nombre d'élèves, ni en fonction de leur milieu social, ni en fonction des résultats aux évaluations, s'étonnent les magistrats. "Il est impossible à partir des données fournies par le ministère de mettre en regard l'évolution des moyens financiers alloués par l'Etat, celle du nombre d'élèves et celle de leurs résultats", jugent-ils.

[...] la différence de traitement commence dès qu'un enfant met un pied dans l'école. Pour un élève de primaire de l'académie la plus défavorisée de France métropolitaine, le pays dépense 2861euros par an. Pour un Parisien, il en dépense 3 134. De la maternelle au CM2, cela fait un différentiel d'une année d'enseignement... Et la scolarité des enfants de 2 ans, qui doit être un accélérateur de réussite pour ceux qui sont les plus éloignés des apprentissages? Les "pauvres" sont les premiers à en être écartés.

[...] A ces écarts de dotation de l'Etat s'ajoute le différentiel important d'une collectivité territoriale à une autre. En lycée, la participation des régions varie du simple au double, et celle des mairies, pour le primaire, de 1 à 10. Mais le comble est que le ministère ne dispose pas de ces éléments. C'est ce qu'il a répondu à la Cour dans un courrier du 13 octobre 2011! Difficile dans ces conditions d'en tenir compte.

Tout cela pose la question du pilotage politique du système éducatif. S'il est une prérogative que la Rue de Grenelle est la seule à pouvoir exercer, c'est bien la correction des inégalités. Or, elle les entérine, selon le constat accablant de la rue Cambon: "Au vu de ces chiffres et de leur évolution récente, aucun élément attestant d'une politique particulière en matière de réduction des inégalités n'apparaît donc de manière flagrante. (...) Alors même que les outils sont disponibles, le ministère ne se met pas en position d'analyser précisément les inégalités territoriales, leurs causes et leurs moyens de les limiter."

La Cour ne fait pas de recommandations. Elle conclut que, "si le ministère souhaite réellement lutter contre les inégalités géographiques de résultats des élèves, une profonde inflexion de ses politiques et une réforme de son mode d'allocation des moyens apparaissent indispensables". En revanche, elle interroge le ministère: "Envisage-t-il une évolution dans sa répartition nationale des moyens ? Si oui, quels en seraient les principes et modalités ?" La réponse apportée à cette question sera un bon indicateur du courage politique du prochain ministre.

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