mercredi 4 juillet 2012

Multinationale et concurrence

Pétrole en Guyane : comment Shell s’est taillé des forages sur mesure (3 juillet 2012, enquête de Jade Lindgaard, mediapart.fr)

[...] Si l'on écoute Shell, les forages guyanais, c’est le progrès humain incarné : parfaitement sûrs et créateurs de richesse sociale et économique. Un rêve de pétrolier. Mais ce tableau idyllique ne résiste pas à l’observation des faits divulgués par la société elle-même. Mediapart a relevé quatre principales contradictions.

Première contradiction : l'absence de réelle étude d’impact [...]
Deuxième contradiction : les rejets d’hydrocarbures [...]
Troisième contradiction : en cas de marée noire [...]
Quatrième contradiction : les bénéfices économiques [...]

Si Shell a pu se tailler des forages sur mesure, c’est en grande partie à cause des insuffisances du code minier. La nouvelle ministre de l’écologie et de l’énergie, Delphine Batho, a annoncé vouloir le réformer.

Mais avant d’être explosé en plein vol, le cabinet de Nicole Bricq avait eu une autre idée, jusqu’ici tenue secrète, pour ne pas attendre la révision – forcément longue – du texte encadrant les activités extractives : introduire une phase de mise en concurrence obligatoire entre l’exploration des fossiles et leur exploitation. Aujourd’hui, le droit des permis fait que la société qui découvre des richesses en sous-sol est quasiment assurée de pouvoir en faire commerce.

La piste élaborée par le précédent cabinet ministériel prévoyait de remettre sur la table les permis une fois les hydrocarbures découverts, afin d’imposer un nouveau cahier des charges, doté de nouvelles conditions à l’exploitation du pétrole : création d’emplois, retombées financières… Quitte à indemniser le détenteur du permis de recherche. Une innovation juridique qui aurait reconfiguré la donne des forages guyanais. Le limogeage de Nicole Bricq et de son équipe a tué ce projet dans l’œuf.

Malgré la dangerosité avérée de ses opérations, puisqu’il s’agit d’extraction non conventionnelle, Shell bénéficient d’une latitude stupéfiante dans la conduite de ses opérations. Cette situation rend difficilement compréhensible la décision du gouvernement français de donner le feu vert administratif qui manquait à la multinationale pour démarrer dans les jours qui viennent cette nouvelle phase de travaux.

On découvre aussi qu’au-delà de la perspective de refonte du code minier, c’est contre le risque de remise en concurrence que s’est sans doute mobilisée l’industrie extractive. « Le vrai sujet, c’est comment s’organise le partage entre les pouvoirs publics et l’exploitant, analyse un conseiller ministériel. On peut avoir toutes les discussions qu’on veut sur la loi de finances, s’il n’existe pas de dispositifs précis pour récupérer la rente pétrolière, il risque de ne pas y avoir de transition énergétique, par manque d'argent pour la financer. »

Aucun commentaire: