mardi 15 janvier 2008

A propos des deux journalistes Français emprisonnés au Niger

J’ai été la semaine dernière profondément choqué par la réponse de Nicolas Sarkozy à une journaliste, lors de sa conférence de presse.
A la question : Que pensez-vous de l’arrestation au Niger des deux journalistes travaillant pour la chaîne de télévision Arte, Thomas Dandois et Pierre Creisson, il a répondu qu’ils avaient fait preuve de légèreté et que « Ce n’est pas parce que l’on est journaliste qu’on doit enfreindre la loi»
Monsieur Sarkozy se détournerait-il soudain du sort de ses concitoyens, lui qui réagit habituellement en sauveur avec la promptitude à laquelle il nous a habitué.
Aurait-il abandonné le réflexe de " sauter sur tout ce qui bouge aux fins de flatter un peu plus son égo et de paraître toujours un peu plus indispensable. Aurait-il abandonné un temps le ridicule d’une peoplelisation forcenée. Non, Monsieur Sarkozy, avec pugnacité, continue de tisser patiemment sa toile, en contrôlant toujours un peu plus les médias et en renforçant
toujours un peu plus le magot et le pouvoir de ses amis milliardaires, Bouygues, Bolloré, Arnaud, Lagardère, Pinault, et j’en passe...
Ainsi dans cette affaire, il fait fi de la liberté de travail des journalistes, un des principaux remparts contre les dictateurs de tous poils à travers le monde. Il insulte la profession dont c’est justement le devoir d’aller dénoncer les injustices dans les pays ou la démocratie est inexistante, en le faisant au péril de leur propre liberté et hélas souvent au péril de leur vie.
Pourquoi ?
Parce que monsieur Sarkozy n’a qu’une philosophie, le Pouvoir et sa Renommée, comme jadis le monarque, avec sa cour et ses fastes. Alors, que pèsent ses deux journalistes gênants qui ne sont pas comme les autres à ses basques ?Car c’est cela, ils sont gênants.
Pour une raison : ils viennent fourrer leur nez dans la politique qu’à toujours mener la France dans ses ex-colonies africaines, avec pour principes : soutenir les gouvernements des pays dont nous puisons scandaleusement les matières premières en les appauvrissant.
Je parle des gouvernements, complices de la France qui s’enrichissent en s’appropriant directement les bénéfices au détriment de la population. De ces gouvernements qui n’hésitent pas à exproprier ou plus radicalement à exterminer ces mêmes populations pour exploiter les ressources de leur sol. C’est précisément le cas au NIGER ! Au Niger vit une ethnie qu’on appelle les TOUAREGS. C’est un peuple qui compte environ deux millions de personnes, réparties sur six pays, l’Algérie, le Mali, le Niger, la Mauritanie, le Tchad et la Libye.
Tout comme les deux journalistes, les Touaregs gênent. Ils gênent les autorités
nigériennes et ils gênent la France qui a des intérêts avec la présence d’AREVA pour l’exploitation des gisements d’uranium.
Je connais bien les Touaregs pour avoir vécu et travaillé à leur coté durant plusieurs mois entre 1981 et 1993. C’est un peuple pacifique, même si l’image périmée du Targui vivant de razzias est encore ancrée dans la mémoire des gens. C’est un peuple qui a un code d’honneur dans lequel on trouve entre autres le respect de la femme, et le manque de courtoisie à leur égard est un motif de déshonneur masculin. Cela découle en partie de l’organisation sociale des Touaregs reposant sur le matriarcat. Ce peuple bien que musulman, pratique la monogamie, ce qui confère à l’épouse une position élevée et un rôle de premier plan dans l’édifice social. Elle bénéficie d’une indépendance économique, doublée d’une liberté d’attitude peu commune dans le monde méditerranéen.
Alors, comment ne pas s’insurger, lorsque le quotidien "Le Monde" (25 mai 2006) relate que les services secrets français« "N’excluent pas, de leur côté, l’existence de relations entre les rebelles touaregs luttant pour leur autonomie et les islamistes algériens du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC), une émanation du GIA, présents dans cette vaste région du Sahara qui va de la Mauritanie au Tchad, où fleurissent la contrebande et le trafic de clandestins". » Comment ne pas s’insurger contre de telles désinformations, alors que la philosophie du Targui est précisément à l’opposé de celle de l’Islam intégriste.
Les populations Touarègue se retrouvent bien malgré elles au centre d’un imbroglio politique, économique et militaire.
Leur sol, jadis délaissé, s’est révélé contenir d’énorme quantités de pétrole, d’uranium et d’or. De quoi aiguiser l’appétit des puissances étrangères. Un sol occupé, hélas, par des menaces plus grandes, la dissémination de mines autour des villes et des axes routiers, en particulier dans le nord du Niger. Les populations fuient leurs localités où les vivres manquent et où les maraîchers des vallées de l’Aïr ne peuvent plus cultiver en raison de la prolifération de ces mines. Enfin, plus récemment, par la présence d’AL-QAÏDA, qui depuis 2001 a commencé d’investir le Sahel, en distribuant armes et capitaux, jouant sur la pauvreté et les différents socio-ethniques des divers pays.
Dans ce contexte, les Touaregs gênent, comme on toujours gêné, les peuples nomades à travers le monde. Le Mali et le Niger renouent avec leurs vieux démons, diaboliser les Touaregs pour mieux les contrôler et exercer leur répression. Alors, on reprend la vieille méthode éprouvée, leur attribuer tous les actes de banditisme, de rackets et d’attaques contre des postes militaires. Le dernier en date est celui de Tin Zawaten au Mali et mené par le chef de guerre Ag-Bahanga, un dissident du mouvement AZAWAD, fermement condamné par la grande figure touareg du Mali, Iyad Ag-Ghali. Al-Bahanga s’est allié avec le GSPC ? Qui s’est lui-même rallié en septembre 2006 à la nébuleuse d'Oussama ben Laden, devenant la "Branche d'Al-Qaïda au Maghreb islamique".Il n’en faut pas plus pour faire croire au monde aux relations entre les
Touaregs et AL-QAÏDA !
Au contraire, les faits démentent cette propagande. Le 1er octobre 2006, le numéro2 du Groupe salafite, Abdelhamid, a été tué dans un violent accrochage avec des Touaregs maliens et le 30 du même mois, une attaque aurait été lancée par le GSPC contre des rebelles touaregs au nord de Kidal pour venger la mort du chef salafiste.
Ces persécutions ne datent pas d’hier. Les Touaregs sont pourchassés depuis qu’ils se sont révoltés à la suite d’arrestations, de tortures et de l’exécution par l’armée nigérienne de centaines de civils en mai 1990. C’était suite à des manifestations dénonçant les détournements d’aides destinées à la réinsertion de près de 18.000 réfugiés, rapatriés des pays voisins à la demande du pouvoir de Niamey. Ces populations avaient fui la famine, consécutive aux sécheresses qui avait sévi à partir de 1984. Depuis, les accords de paix se sont multipliés mais n’ont jamais été respectés par les gouvernements et la répression a perduré. Depuis, La France, à travers ses dirigeants a toujours révélé son visage de "médiateur intéressé ". Pour maintenir son hégémonie sur la région et conserver sa main mise sur les richesse naturelles, elle a toujours dénoncer officiellement la résistance touarègue sans jamais faire allusion à de quelconques massacres.
Devant un tel constat, comment ne pas éprouver un immense sentiment de tristesse et de révolte.
Les deux journalistes français incarcérés le 17 décembre sont accusés par les autorités d’avoir enfreint l’interdiction de se rendre dans le nord pour réaliser un reportage sur la rébellion touareg du Mouvement des Nigériens pour la justice (MNJ).Tous les quatre sont passibles de la peine de mort.
Jean
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