jeudi 1 mars 2012

De l'argent emprunté à 1% ... et prêté à 5%



La création monétaire (le fait de créer de l'argent à partir de rien) a été privatisée en France en 1973 au profit des banques privées : l'endettement public croissant depuis cette date est causé par le remboursement des intérêts, et non par les dépenses publiques qui sont, elles, restées constantes (relativement au PIB).
Il est urgent de rendre aux Etats la création monétaire car l'argent est un bien commun dont la valeur est fondée sur la confiance collective. Rien ne justifie que les Etats payent des intérêts à des banques privées lorsqu'ils ont besoin d'argent pour financer des services ou des investissements publics. Quant à l'argument de 1973 de lutte contre la « planche à billets », il est dérisoire : elle tourne de toute façon, la preuve ci-dessous !

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La planche à billets, une affaire d’Etat
(Michaël CHETRIT, économiste et juriste européen,
22 juillet 2011, liberation.fr)

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Les banques «accros» à l'argent de la BCE

(29 février 2012 | Par Martine Orange | mediapart.fr)

[...] en fidèle ancien de Goldman Sachs, Mario Draghi fait exactement ce qu’avait fait Alan Greenspan, durant ses dix-sept années à la tête de la Fed : la politique de Wall Street. Il déverse des tombereaux de liquidité sur les marchés financiers, leur fournissant le carburant pour toutes les spéculations et les dérèglements, par peur de voir la machine s’arrêter.

Mercredi, la Banque centrale européenne a donc rouvert les guichets et distribué à volonté des prêts à 1 % sur trois ans aux banques : 530 milliards d’euros ont été ainsi consentis à 800 établissements bancaires, dans le cadre du généreux programme LTRO qui permet au système financier d’avoir de l’argent quasi gratuitement. Fin décembre, la BCE avait déjà accordé 489 milliards d’euros, selon les mêmes modalités.

En moins de trois mois, ce sont pas moins de 1 000 milliards d’euros qui ont été injectés dans le système financier. Si ce n’est pas de la création monétaire et de la monétisation de la dette, on ne sait comment qualifier cela [...] De fait, le système bancaire européen est toujours sous assistance respiratoire, de plus en plus « accro » aux drogues de la banque centrale et de l’argent gratuit.

Le recours aux prêts massifs de la banque centrale traduit les dysfonctionnements majeurs des marchés interbancaires : ils restent totalement gelés. La confiance a disparu et les banques refusent de se prêter entre elles. [...]

Compte tenu des besoins de recapitalisation et de désendettement auxquels elles doivent faire face – on parle de 2 000 milliards d’euros d’ici à 2015 –, les nouveaux prêts accordés risquent de connaître la même destination que les premiers et d’être directement préemptés par les banques.

[...] grâce à l’argent mis généreusement à leur disposition à 1 %, les banques ont accepté de le reprêter aux pays de la zone euro à 4 ou 5 %, en rachetant leurs dettes. [...]

Pour justifier ces nouvelles aides massives, la BCE comme le monde politique avancent le même argument : l’argent prêté sert à financer l’économie réelle. Les banques peuvent prêter à nouveau aux entreprises et aux particuliers. Le cercle vertueux de la reprise économique va s’enclencher.

L’ennui est que les bienfaits attendus tardent à se concrétiser. Lors de sa dernière présentation, Mario Draghi reconnaissait qu’il avait du mal à trouver trace d’une reprise des crédits à l’économie. De son côté, l’institut de la finance internationale note « un resserrement marqué du crédit au quatrième trimestre, particulièrement en France et en Italie ». Elle dit n’attendre aucun rebond, compte tenu des « conditions difficiles sur les marchés de crédit ».

En un mot, l’argent tourne sur lui-même dans la sphère financière, nourrissant la spéculation. Le rebond des marchés boursiers, depuis janvier, s’explique en grande partie par ce recyclage des facilités de la banque centrale. Demain, selon des effets bien connus désormais, la masse de cet argent gratuit risque de se concentrer sur d’autres actifs jugés sûrs jusqu’à former de nouvelles bulles. Des spécialistes anticipent déjà des spéculations sur le pétrole, les matières premières comme le cuivre ou le blé, au risque de créer de nouvelles émeutes de la faim.

Mais ces dangers n’ont l’air d’effrayer personne. La BCE a à peine fermé ses guichets que le monde financier spécule déjà sur le moment où elle va les rouvrir. Officiellement, le programme de prêt à long terme est clos. Mais déjà, des voix se font entendre, y compris au sein de la BCE, pour une troisième distribution, si nécessaire : on ne se lasse pas de l’argent gratuit, surtout quand il permet d’éluder tant de problèmes que personne ne veut affronter [...]

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