samedi 4 septembre 2010

Socialismes ...

Il y a quarante ans, Allende ouvrait une nouvelle voie vers le socialisme
(Le Monde Diplomatique,
Renaud Lambert, 4 septembre 2010)

Le 4 septembre 1970, une coalition (allant des communistes aux socio-démocrates) porte Salvador Allende à la présidence du Chili [...]

Dans son discours de victoire, le nouveau président promet : « Nous abolirons les monopoles qui accordent le contrôle de l’économie à quelques dizaines de familles. Nous abolirons un système fiscal (…) qui accable les pauvres et épargne les riches. Nous abolirons la grande propriété qui condamne des milliers de paysans à la servitude. Nous abolirons la mainmise étrangère sur notre industrie. » Il ajoute, ouvrant une voie encore peu fréquentée vers la transformation sociale : « Le socialisme passe par la démocratie, le pluralisme et la liberté ».

Le vent d’espoir qui souffle le long de la cordillère des Andes galvanise jusqu’aux rangs du parti socialiste français, qui a élu en 1971 un nouveau premier secrétaire : François Mitterrand. Celui-ci, particulièrement séduit par cette expérience de « Révolution dans la légalité », réserve son premier voyage officiel au Chili.

A l’époque, « le fond de l’air est rouge ». Washington s’en émeut. [...] Henry Kissinger, résume : « Je ne vois pas pourquoi nous devrions laisser un pays devenir marxiste simplement parce que sa population est irresponsable. » Le 11 septembre 1973, l’armée chilienne – soutenue par la presse, l’organisation fasciste Patrie et Liberté, le Parti national et les Etats-Unis – remet le peuple « dans le droit chemin ».

Trois ans, presque jour pour jour, après sa première allocution en tant que président du Chili, Allende prend la parole pour la dernière fois. La Moneda (le palais présidentiel) est sous les bombes : « Nos ennemis sont forts ; ils sont capables d’asservir le peuple. Mais ni les actes criminels ni la force des armes ne sauront contenir ce processus social. L’histoire nous appartient ; c’est le peuple qui fait l’histoire. »

En 1973 débute l’une des dictatures les plus violentes d’Amérique latine, qui fauche l’utopie de la « Révolution dans la légalité » et transforme le Chili en laboratoire planétaire du néolibéralisme.

La même année, Henry Kissinger reçoit le Prix Nobel de la paix.

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EXTRAITS DU DISCOURS DE SALVADOR ALLENDE PRONONCÉ À L’ONU, LE 4 DÉCEMBRE 1972
(25 janvier 2005, LDH Toulon)

[...] “Nous sommes face à un véritable conflit entre les multinationales et les États. Ceux-ci ne sont plus maîtres de leurs décisions fondamentales, politiques, économiques et militaires à cause de multinationales qui ne dépendent d’aucun État.

Elles opèrent sans assumer leurs responsabilités et ne sont contrôlées par aucun parlement ni par aucune instance représentative de l’intérêt général.

En un mot, c’est la structure politique du monde qui est ébranlée.

Les grandes entreprises multinationales nuisent aux intérêts des pays en voie de developpement. Leurs activités asservissantes et incontrôlées nuisent aussi aux pays industrialisés où elles s’installent.

Notre confiance en nous-même renforce notre foi dans les grandes valeurs de l’humanité et nous assure que ces valeurs doivent prévaloir. Elles ne pourront être détruites !”

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Le Socialisme néomoderne ou l’avenir de la liberté
(Suite de La Dissociété, Jacques Généreux, 4 septembre 2010)

Le culte de l’individu auto-construit et la mondialisation du capitalisme libéral n’ont pas accompli la promesse moderne de l’émancipation. Elles ont juste défait les liens sociaux, sans lesquels aucune liberté ne peut grandir. L’hyper-libéralisme engendre une dissociété violente et désordonnée. Et face aux désordres, les nouveaux « libéraux » organisent le retour vers un ordre pré-moderne, mélange de répression policière, d’intégrisme religieux, de contrôle communautaire et d’abrutissement dans le travail.

Le défi politique du XXIe siècle est de penser un ordre social qui n’effacerait pas trois siècles d’émancipation. Il nous faut abandonner l’illusion d’une construction libérale de la société pour engager la construction sociale de la liberté. Or, tel a toujours été l’essence du projet socialiste, de Leroux à Blum, en passant par Marx et Jaurès. Les multiples dévoiements de ce projet ne le disqualifient pas ; ils exigent sa refondation néomoderne : une nouvelle modernité dont les principes politiques ne découlent plus du mythe moderne de l’individu autonome, mais de la réalité anthropologique de l’être social.

À la lumière des sciences humaines, et à l’opposé d’une gauche « moderne » qui s’attarde à courir derrière des idées libérales dépassées, l’auteur dessine un socialisme qui dépasse la modernité pour en accomplir la promesse, qui offre un nouvel avenir à la liberté.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Il ne faudrait tout de même pas sanctifier Allende qui, tout comme son successeur, ne fut qu'un sombre dictateur.

Lire l'excellent http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/il-y-a-40-ans-salvador-allende-et-80552